Camp de migrants au Sanitas : agacements et indifférences

6 semaines après l’installation des tentes dans un square du quartier, faisons le point sur la situation.

AGACEMENT N°1 : celui de l’association Chrétiens Migrants.

A l’origine de l’installation de ces tentes abritant en ce moment une trentaine de personnes (dont une quinzaine d’enfants), elle s’offusque de voir que les choses n’avancent pas alors que d’après elle la situation est critique pour ces familles venues d’Arménie, de Géorgie, du Kossovo ou de l’Angola.

Normalement, pendant les trois premières semaines d’août, Rose-Marie – bénévole qui gère l’accueil au local de l’association au rez-de-chaussée d’un immeuble – part en vacances. Ce qui entraînerait la fermeture de l’appartement et donc priverait les migrants de leur accès aux toilettes et à l’eau. Inadmissible pour l’association et ses soutiens (RESF, Ligue des Droits de l’Homme et élus EELV) qui enjoignent les pouvoirs publics à réagir (Etat comme mairie) afin de trouver une solution pour éviter un problème sanitaire :: « ici il y a des personnes handicapées ou malades. C’est déjà miraculeux qu’il n’y ait pas encore eu d’accident » s’alarme Louis Barraud, président de la structure qui précise tout de même qu’il « ne laissera pas tomber les gens » donc si ren n’est installé (douches de chantier, toilettes sèches ?), le local sera quand même ouvert.

Chrétiens Migrants réaffirme aussi qu’aucune personne hébergée sur le site n’est sans papiers et en situation irrégulière contrairement à ce qu’affirme la préfecture. Et réfute l’idée qu’il puisse y avoir un appel d’air, que leur présence attire d’autres personnes.

INDIFFERENCE N°1 : celle des autorités (dit Chrétiens Migrants).

« Si quelqu’un crève ici ça dissuadera les autres de venir… C’est ça leur raisonnement ? L’humain, ils s’en fichent ! » lance l’association. Une bénévole ose un parallèle : « Alors que les animaux abandonnés dehors sont automatiquement amenés à la SPA, il n’existe pas de SPH, Société Protectrice des Hommes. » Les militants racontent leurs inombrables démarches et aller-retours entre la ville, le département et la préfecture. Encore en ce début de semaine. Mais le maire de Tours est en vacances, et le Directeur Départemental de la Cohésion Sociale est parti en retraite et n’a pas encore été remplacé. Seul le Conseil Départemental a promis d’appeler la préfecture.

« Il y a une volonté de laisser pourrir le sujet » souligne-t-on chez Chrétiens Migrants qui ne veut pas accepter que la mairie de Tours se défausse du dossier sous prétexte que l’hébergement d’urgence revient à l’Etat : « qu’ils démontrent qu’ils suivent l’esprit de partage de St Martin autour duquel ils font tant de communication ! » « Le maire est parfois sur la même ligne que le FN » soufflent même plusieurs voix…

INDIFFERENCE N°2 : Chrétiens Migrants seul dans son coin :

« Bien sûr qu’on prêche dans le désert » reconnait Louis Barraud. Car aucune grande association d’aide d’urgence ne le soutient officiellement et ne prend position avec ses revendications. Ni la Croix Rouge, ni l’Entr’Aide Ouvrière, ni les Restos du Coeur, ni le Secours Catholique… « Ils nous reprochent de faire de la politique. Eux, ils sont juste bons à exécuter les ordres des pouvoirs publics » raille-t-il dénonçant l’ambiance délétaire lors de la dernière réunion sur l’hébergement d’urgence le 1er juillet où la situation du camp n’a pas été abordée (car pas à l’ordre du jour). Du côté politique, seuls les Verts s’affichent avec l’association. Les autres n’ont rien dit du tout.

INDIFFERENCE N°3 : celle d’une partie de la population.

Nous sommes partis à la rencontre des habitants du Sanitas qui vivent auprès du campement. Une partie est relativement indifférente à la présence des migrants. Et les soutient à demi-mot : « c’est vrai qu’il y a plein de logements vides… » soupire une femme de ménage qui nettoie les halls d’immeubles. Quant à la presse, elle semble aussi trouver le feuilleton peu sexy, surtout en période estivale. 2 des 8 médias généralistes tourangeaux étaient ainsi présents pour la conférence de presse de ce mardi. « En temps de crise, les gens s’intéressent d’abord à leurs problèmes » nous dit le conseiller communautaire Didier Vallée. D’ailleurs, il faut bien reconnaître que nos articles sur le sujet n’ont pas passionné les foules.

AGACEMENT N°2 : celui d’habitants du quartier.

Ce dernier est impossible à nier. Les relations sont tendues entre une partie de la population, l’association et les migrants (ponctuellement avec des arguments racistes, il faut le noter) : « on n’ose plus passer devant, on a peur de se faire agresser et les enfants ne peuvent plus aller jouer au square » explique un couple de retraités qui raconte que plusieurs soirées tendues ont eu lieu ces dernières semaines à proximité de l’Allée de Luynes. « Je me suis déjà fait agressé verbalement parce que je refusais de donner à quelqu’un qui faisait la manche » note un salarié. Une retraitée essaie de nuancer : « c’est bien pour eux s’ils obtiennent ce qu’ils veulent mais on en a assez de leurs allers-retours. » Au camp, on préfère mettre en valeur les habitants qui apportent nourriture ou objets du quotidien pour aider et on affirme que c’est les migrants qui se font agresser par des individus du quartier, soi disant sans que la police ne réagisse. 

Olivier COLLET

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