Robert, le papa poule des entrepreneurs de Mame à Tours

Depuis deux ans, l’ancien militaire veille sur l’ancienne imprimerie reconvertie en incubateur de start-ups.

Il connait le site dans ses moindres détails, observe et commente ses mutations au fil du temps, apprécie le gain de luminosité apporté ces dernières semaines avec l’abattage de cloisons et la disparition d’une mezzanine… Entre deux cafés, il court partout, gère l’emploi du temps, accueille les nouveaux arrivants, chapeaute l’organisation d’événements… De lui on dit que c’est « le couteau suisse » de Mame, que sans lui ce serait « le bazar ». Robert est l’animateur, « le facilitateur » de la Cité du Numérique de Tours, incubateur de start-ups installé dans l’ancienne Imprimerie du Boulevard Preuilly. Un personnage, une pile électrique, un homme hors du commun que l’on voulait connaître un peu plus.

Au départ il nous demande pour combien de temps on en a avec nos questions… On la joue optimiste, on parie sur 30 minutes. Le rendez-vous a duré 1h30, entrecoupé de quelques coups de fils, plusieurs blagues, sur fond de parties de ping pong ou de billard. On s’est installé au cœur du bâtiment, « sur la Place du Village » entourée des bureaux des différentes entreprises, une vingtaine désormais, avec pas loin de 100 personnes qui travaillent. Ce village, Robert n’en est pas le maire mais sans doute le père spirituel. Il est arrivé il y a deux ans, à l’été 2014, quand Michelin a investi les lieux pour préparer la reconversion des salariés partis du site de Joué-lès-Tours.

Ancien militaire, engagé dans l’armée pendant 25 ans, Robert est un Lorrain. A 54 ans, il a beaucoup voyagé, et continue à faire l’aller-retour chaque week-end pour retrouver sa famille dans l’est de la France : « tout le monde sait que le vendredi, je pars pour 16h30, je passe chez-moi et je prends le TGV à 18h. Je rentre le dimanche à 20h pour être là le lundi matin. » Et entre les deux, il passe vérifier que tout s’est bien passé pendant le week-end…

Consciencieux, rigoureux, pouvant paraître un peu rigide au premier abord, ce spécialiste de la reconversion professionnelle et de l’accompagnement humain qui a travaillé pour Michelin ou PSA a vu son métier évoluer ces derniers mois, en même temps que l’ex-imprimerie. Michelin est parti, les start-ups sont arrivées et on lui a proposé de rester, pour animer les lieux, soutenir les jeunes chefs d’entreprises au quotidien. Ca lui plait, et il est vite devenu indispensable… sans pour autant être homme à tout faire, et il insiste bien là-dessus.

« J’arrive le matin à 7h45 et je suis souvent le dernier parti. Je vis ici » raconte Robert, le regard droit, l’air assuré. Il a son caractère, mais au fond c’est un vrai gentil, on le sent même émotif. Attachant et attaché, il garde tout en mémoire, digresse sans cesse de nos questions pour partir vers une anecdote. En à peine plus de 6 mois de cohabitation avec les animateurs de la French Tech Loire Valley, il définit plusieurs d’entre eux comme des amis, se souvient des très beaux cadeaux que tous lui ont offert pour Noël, en lui faisant une grosse surprise au pied du sapin : « j’en ai pleuré… »

Pourtant il les bouscule les locataires de bureaux : la propreté de la cuisine, la participation aux réunions en commun… Il y a des règles et il faut les respecter. Mais à côté de ça, le dynamique Robert n’est jamais avare d’un coup de pouce, ou d’un coup de visseuse s’il faut accrocher un porte-manteau dans une cloison : « j’ai mon atelier au sous-sol avec tout ce qu’il faut. »

Quand on veut entrer dans le bâtiment, c’est son prénom qu’il faut chercher sur l’interphone, et si vous êtes nouveau il se chargera de vous présenter les lieux et d’en faire la promotion, même de manière improvisée. Le tout autour de son bar, où le café est à 60 centimes. « Les brèves de comptoir, c’est très important ! » clame-t-il très sérieusement, quitte à ce que les pauses s’éternisent un peu. Mais parfois, ça permet aussi de souder les liens entre les occupants… et de développer des partenariats (là aussi, Robert a plein d’exemples à citer).

« Ce château m’appartient » plaisante encore Robert au détour d’une question… Drôle (parmi ses expressions fétiches : « c’est délire »), naturel, spontané et sans filtre, l’homme espère réussir à conserver le plus possible l’ambiance instaurée. Celle qui fait qu’ils sont souvent 40 à manger ensemble le midi sur cette fameuse « Place du Village » et qu’on lui reproche gentiment son absence s’il file vers un restaurant du coin.

C’est lui aussi qui a instauré les rendez-vous « croissants » pour présenter les nouveaux arrivants (ou les stagiaires) et il n’hésite pas à toquer à la vitre d’une société avec son verre pour rappeler que c’est l’heure de boire un coup, même s’il y a plein de boulot. Conserver cet esprit, ce sera cependant « un défi », et c’est lui qui le définit ainsi, car dans les prochains mois Mame va encore s’agrandir avec l’arrivée de nouvelle entreprises, de l’ESTEN… et l’environnement pourrait changer. « J’aimerais bien résister. Ici je me découvre. Il y a un bonheur d’échanger et je ne vois pas d’autres entreprises qui font ça. »

Au beau milieu des artisans de l’économie de la débrouille, de toutes ces sociétés appelés à inventer leur modèle économique pour réussir, voilà un homme sérieux, doué pour le contact humain, qui met l’ambiance en priorité N°1 et donne tout ce qu’il a pour réussir. Un esprit à préserver.

Olivier COLLET

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