« Je crois en un seul Dieu » : le choc des mots

Une pièce puissante et déstabilisante, évoquant le conflit israélo-palestinien.

Tout est dans la répétition. Les dates, d’abord : « 29 mars 2002, à 14h zéro quatre »… « 8 avril 2003, à 22h zéro quatre. » « D’un numéro de téléphone, aussi : « 45 61 37 02 ». Ces dates, ces numéros, répétés encore et encore si bien qu’ils ne vous quittent plus en sortant du Théâtre Olympia de Tours. Ce mercredi soir, c’était la première représentation de Je crois en un seul Dieu, pièce proposée dans le cadre du festival Désir… Désirs qui débutera le 1er février (et dont on vous parlait en détails ici). Sur scène, une femme : Rachida Brakni. Elle interprète trois rôles : celui d’une jeune palestinienne qui s’apprête à devenir martyr, celui d’une enseignante israélienne traumatisée par un attentat et celui d’une militaire américaine qui intervient dans les situations délicates. Trois femmes qui racontent la même histoire, d’où les répétitions.

Enfin, la même histoire. Disons plutôt que chacune évoque le film d’une époque, avec son point de vue. Ici, c’est bien sûr du conflit israélo-palestinien dont il est question. Je crois en un seul Dieu a voulu capter les émotions et les ressentis des différents partis impliqués. A travers les récits de ces trois femmes qui vont converger le même soir dans un bar en plein air de Tel Aviv, on a – en 1h40 – un panorama émotionnel sur ce que peuvent ressentir les populations sur place et la communauté internationale, qui peine à agir.

Sur scène, presque pas de décor. Rachida Brakni est seule dans une pièce avec 3 portes et une lumière. Rien d’autre. Mais elle incarne tellement bien ces trois femmes que l’imagination fait le reste. Et on la voit marcher vers le repère des terroristes, se relever dans les débris de verre après une explosion ou intervenir lors d’une prise d’otages. Le texte, abrupt, puissant, souvent glaçant, mais aussi très fin et parfois drôle, est truffé de détails, de précisions qui permettent d’y voir clair malgré des scènes sombres.

Les répliques sont extrêmement fortes, comme celle-ci, lapidaire mais juste pendant le récit de l’intervention américaine sur une prise d’otages de deux Israéliens par un Palestinien : « quelque soit la fin, il y aura demain quelqu’un pour venger l’affront. » L’analyse d’une escalade de la violence qui ne se soucie plus de savoir comment on peut trouver la paix mais de qui a déclenché la guerre, sans parvenir – là non plus – à trouver une réponse. « Pour ceux qui réchappent d’un attentat, la mort reste fixée dans la tête. Elle reste comme une dette. Ici l’histoire s’écrit en direct » lance la comédienne avec la voix de l’enseignante israélienne avant d’ajouter : « c’est comme si notre 1er commandement était devenu la sécurité. Cette obsession n’est pas la mienne », puis de se questionner – et de nous questionner aussi, indirectement – sur le sentiment de vengeance.

« Pourquoi j’ai l’impression que le monde leur appartient, même quand ils se recoiffent ? » s’interroge la jeune palestinienne. « Pourquoi j’ai l’impression que le monde leur appartient même quand ils boivent du thé ? » demande juste après l’enseignante. Cette pièce est une introspection dans la tête de trois esprits habités par les scènes de violences, à différents degrés. Le but n’est pas de juger, mais de ressentir, de mettre en parallèle. L’effroi, la peur, l’adrénaline, les blessures, la colère… Je crois en un seul Dieu pénètre au plus profond des âmes et dégage un suspens insoutenable, un humanisme torturé mais surtout dépeint – par cette fiction contemporaine – un monde bien réel qu’on aimerait pourtant voir s’évaporer…

O.C.

Je crois en un seul Dieu, jusqu’à ce samedi 28 janvier au Théâtre Olympia / Photo : Sonia Barcet

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