Le taxi tourangeau devenu VTC

Un témoignage intéressant pour illustrer le conflit qui oppose les taxis et les Véhicules de Tourisme avec Chauffeur.

Hervé Chambre est un amoureux des voitures avant tout, un passionné. Résidant à Montlouis-sur-Loire, il y a longtemps été taxi : pendant 16 ans, et même syndiqué à une époque. Et puis son activité est devenue compliquée. Ayant possédé jusqu’à 4 licences, les derniers mois il n’en avait plus que deux ce qui le faisait vivre lui et un salarié, en grande partie grâce à des transports médicaux pour la sécurité sociale, parfois de grands trajets ou de longues courses suite à des événements. Mais ses dettes étant trop importantes il a dû se résoudre à mettre la clef sous la porte et à revendre ses deux licences (tout en garantissant le réemploi de son salarié).

Ca, c’était fin 2014. Mais comme tout le monde, Hervé Chambre a besoin de continuer à travailler. Et que sait-il faire de mieux ? Conduire une voiture avec des passagers. Il a donc participé à la création de Natali, une entreprise de VTC, toujours basée à Montlouis et dont il est l’unique salarié (une présidente assurant par ailleurs la gestion, vu qu’il n’avait pas le droit de créer lui-même une structure suite à la liquidation de sa précédente activité).

Taxis pas aimables ou  trop rares : les faiblesses du système à Tours

L’homme repart donc à zéro, ou presque. Si il a choisi cette nouvelle activité, c’est grâce à sa simplicité : les contraintes au quotidien sont moins importantes que pour les taxis (pas de compteur notamment) mais « ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas de règles pour les VTC » explique-t-il. Ainsi, son véhicule est tenu de faire au moins 4m50 de long et 1m70 de large, il doit avoir moins de 6 anx sauf s’il est hybride ou électrique, le chauffeur doit justifier d’une formation de 250h et, surtout, il ne peut pas prendre un client qui n’a pas réservé sa course à l’avance. Mais comme Hervé Chambre l’explique, cette dernière condition, il l’appliquait déjà souvent en temps que taxi rural, car il n’avait pas le droit d’attendre devant les gares de Tours et St-Pierre-des-Corps (réservées aux taxis du GIE, le fameux « 20 30 40 »).

L’ancien taxi est d’ailleurs remonté contre certaines pratiques de ses confrères. Si aujourd’hui les VTC sont très marginaux en Touraine (à peine plus d’une dizaine), il s’attend à ce que plusieurs autres finissent par se lancer sur ce marché aux dépens du taxi dont l’image locale ne cesse de se détériorer : « les clients se plaignent notamment du manque d’amabilité, des prix, de ne pas trouver de taxis même en pleine journée, par exemple aux heures de pointe. Des chauffeurs reprochent aussi au GIE d’avantager certains d’entre eux en leur proposant les meilleures courses (il y avait d’ailleurs eu une grève il y a quelques mois, ndlr)… » et des anecdotes comme ça, il en a à la pelle ! Clairement, si les taxis tourangeaux vont mal, c’est aussi parce qu’ils se seraient tiré une (voire plusieurs) balles dans le pied.

VTC : 10 à 20% moins cher en Touraine

Expert du conflit taxis-VTC, Hervé Chambre comprend néanmoins certaines de leurs inquiétudes, et en particulier celle concernant l’application Uber Pop permettant à des particuliers de prendre des clients. Ca, il est farouchement contre. En revanche il suggère aux taxis de se lancer dans le covoiturage : « quand vous avez un premier client qui va à St-Pierre-des-Corps puis un deuxième à La-Ville-aux-Dames, vous pouvez prendre les deux en même temps au lieu de faire des allers-retours. » Plus écologique, et plus économique pour les passagers qui apprécieraient sans doute une telle astuce. Mais apparemment, ça ne coule pas de source auprès de ses ex-confrères dont il pointe le manque de capacité à se réinventer; « Par exemple, au départ, Uber avait proposé aux taxis français de s’associer avec eux pour qu’ils utilisent l’application. Mais ils ont refusé. En revanche en Allemagne ils ont accepté et font désormais de la pub pour cette entreprise. »

D’ailleurs, Hervé Chambre l’assume : si demain Uber arrivait à Tours, il serait tout à fait enclin à travailler via cette application. Mais le marché est encore trop confidentiel. En revanche, il est en contact avec un concurrent français : Eco Taco, une application déjà présente à Paris, Lyon ou Montpellier et qui devrait prochainement s’installer à Nantes et Tours. Comme Uber, elle permet aux clients de réserver un VTC via leur smartphone.

Car désormais l’enjeu pour notre chauffeur c’est de se faire connaître. Vu qu’il n’a pas le droit d’attendre sur le bord de la route ou de faire des transports médicaux. Ses prix pourraient l’y aider : « ils ne sont pas ‘cassés’ par rapport à ceux des taxis mais 10 à 20% moins élevés. Par exemple, un trajet de Montlouis à l’aéroport de Tours c’est 45€ au lieu de 55€. » S’il ne fournit pas (encore) la fameuse bouteille d’eau et est opposé à l’idée d’offrir des bonbons, il va en revanche prochainement équiper son véhicule japonais haut de gamme d’une clé 4G pour proposer le wifi, « mais ça, je le faisais déjà en tant que taxi » conclut-il. Une dernière petite pique pour la route !

Olivier COLLET

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